Photographes contemporains d’Ukraine

EXPOSITION

1999 Festival EST-OUEST, DIE, France

1999 LE QUAI École d’Art, MULHOUSE, France

2000 CENTRE D’ART CONTEMPORAIN DE THESSALONIQUE, Grèce

ARTISTES : Serhiy Bratkov, Vasilij Cagolov, Vadim Checkorsky, Iliya Chichkan, Alexander Hnilitski, Alexander Kharchenko, Viktor Kotchetov, Miroslav Kulchitsky, Boris Mihailov, Andrey Moskvichev, E. Mukhoid, Mihail Schevchenko, Alexander Shevchuk, Serhiy Solonsky, Vasily Ryabchenko, Ivan Tsupka

COMMISSARIAT : Marta Kuzma, critique d’art, Jean-Claude Schenkel, Directeur du Quai – École d’Art de Mulhouse et de Haute Alsace


En Ukraine, la photographie contemporaine a connu une double évolution. En effet, les personnes qui appartenaient traditionnellement au milieu de la photographie pendant la période soviétique ont suivi une voie différente de celle des artistes formés dans les diverses académies d’art. La tradition de la photographie et son application en dehors du reportage ne trouvent pas leur origine chez les artistes cités habituellement et considérés comme les fondateurs du mouvement artistique dissident d’Ukraine.

La photographie s’est développée, presque essentiellement et comme un phénomène quasiment isolé, à Kharkiv, une ville à l’est du pays. Ce mouvement d’avant-garde lancé à la fin des années soixante ne cessa d’évoluer, contrairement à la peinture qui ne prit part à aucun mouvement non formaliste pendant la période soviétique. Le mouvement photographique de Kharkiv constitué par le groupe Vremya, qui comptait parmi ses membres le célèbre photographe et artiste Boris Mihailov, débuta sous la forme d’une organisation populaire, à l’instar d’autres organisations qui s’essayaient à un type de discours et d’exposition convoités, sortant du cadre admis officiellement.

Il ne s’agissait pas simplement d’un mouvement de contre-culture mais bien d’une tentative d’aborder la photographie comme un moyen d’amener, par un effort « d’innervation « , la réalité vue à travers l’objectif au coeur d’une structure sociale apparemment anesthésiée.

En Union Soviétique, la photographie était réservée à des personnes désignées qui n’utilisaient leur appareil photo qu’à des fins officielles et gouvernementales.

Les photographes de Kharkiv se voyaient donc contraints d’utiliser la plupart du temps des images standard de scènes anodines représentant l’infrastructure industrielle et économique (ouvriers, moyens de transports et immeubles). Ils retouchaient souvent ces photos en modifiant et en démarquant les couleurs.

La photographie qui vit le jour après la Glasnost, dans une Ukraine fortement régionalisée, est le fruit de la rencontre de deux camps: celui des ingénieurs devenus artistes à Kharkiv d’une part, et celui des peintres devenus artistes installateurs dans des villes comme Kiev et Odessa d’autre part. Le mouvement né à Kharkiv, ancienne  » enclave de la photographie « , adopta une position beaucoup plus antagoniste, se fixant pour objectif de créer un forum de la photographie en tant qu’art, et ce grâce aux efforts de groupes comme The Fast Reaction Group (présentant l’œuvre de Serhiy Bratkov et Serhiy Solonsky).

Dans d’autres villes, les élèves fraîchement diplômés de l’Art Institute traduisirent leur intérêt pour la pellicule dans des  » situations  » qu’ils rendaient tout d’abord sur des toiles, puis par des techniques photographiques. Des artistes tels que Iliya Chichkan de Kiev ont ainsi commencé à présenter des sujets noirs dans des photographies grand format qu’ils peignaient ensuite avec du sépia ou d’autres peintures. Par opposition à Kharkiv, la photographie est devenue une voie nouvelle pour les artistes en quête d’une autre dimension pour réaliser leur œuvre.

Dépeindre précisément ce qui constitue la spécificité de la tradition et de l’évolution de la photographie en Ukraine, c’est comprendre l’importance qu’a toujours eu la photographie artistique, à la fois dans l’histoire et actuellement, par rapport é ce que fut la prédominance de la photographie documentaire.En d’autres termes, malgré la retouche de l’image ou la mise en scène, la photographie reste marquée par la réalité et la critique de la société.

Marta Kuzma